La dimension sonore des expériences physiques 2/6

L’utilisation de la musique dans un environnement de service a pour conséquence d’augmenter ou de diminuer le niveau de stimulation. Un tempo rapide associé à un volume élevé augmente l’état d’excitation et incite à marcher ou à consommer plus vite : le phénomène inverse est observé en présence d’une musique plus lente et moins forte.

Du point de vue du design de l’expérience cible, elle contribue à la détente et au lacher prise, à l’immersion dans le lieu d’accueil.

De manière plus ou moins consciente, et à condition que l’air qu’il entend correspond à ses goûts, le consommateur ajuste son rythme à celui de la musique. Si en plus l’air est connu, le plaisir induit par la musique influence positivement la perception de l’enseigne et l’image du personnel. Selon une étude réalisée dans un restaurant et citée par Lovelock (2007) « le chiffre d’affaires sur les boissons augmente de 41% et la marge totale de 15% quand on diffuse une musique lente plutôt que rythmée. Les clients qui dinent en écoutant une musique lente restent en moyenne 15 minutes de plus que ceux qui dinent au son d’une musique très rythmée. » De plus, un tempo lent favorise les réponses émotionnelles positives et l’impression que le temps passe plus vite, conditions favorables aux achats plaisir. D’une manière générale, la musique peut être un outil très efficace pour augmenter la satisfaction, et diminuer les états de stress et l’impression d’attente. Inversement, dans un environnement de service où la musique est absente, le consommateur passe moins de temps, se sent moins joyeux et discute moins avec le personnel en contact. Pour créer une ambiance musicale efficace, le volume et le tempo ne sont pas les seules dimensions à prendre en compte : il est aussi essentiel d’intégrer les gouts musicaux de la clientèle que l’on souhaite cibler. L’agence de branding sonore Gomus basée au Brésil a développé une innovation qui consiste à intégrer une puce RFID dans les vêtements. Ce système permet au consommateur lorsqu’il essaie un article dans la cabine d’essayage d’entendre une chanson qui correspond au style du vêtement essayé.

Chez Starbucks, la musique fait partie intégrante de l’environnement depuis le début : l’enseigne a su créer un lien d’intimité avec ses clients en diffusant une sélection de titres en affinité avec leurs gouts et en s’associant avec Spotify pour diffuser ses playlists. Madeleine Peyroux, l’interprète de Careless Love, ne connaissait qu’un succès modeste avant d’être découverte et popularisée par Starbucks.

Si la musique est surtout utilisée pour favoriser l’impression de bien être dans un environnement de service, on peut aussi s’en servir pour créer l’effet inverse : l’opéra et la musique classique sont un outil puissant pour prévenir les agressions et les comportements anti sociaux dans les gares, le métro, les centres commerciaux et même chez Mac Donald’s. Une expérience conduite par la régie des Transports Londoniens en 2005 a révélé que de la musique classique diffusée dans les couloirs du métro avait conduit à une diminution des agressions et des vols à la tire (-30%) et du vandalisme (-37%). Aujourd’hui, la musique de Mozart, Vivaldi et Haendel est présente dans plus de 60 stations.

Quand on pense environnement sonore, on pense musique, mais les voix et les jingles sont aussi des signaux dont il faut assurer la cohérence au travers des différents canaux de diffusion

Le sonal dans les gares SNCF

 «Ta-tatadam», vous avez sûrement déjà entendu ces quatre notes sur un quai de gare avant une annonce, ou dans une publicité SNCF. En quittant les codes habituels des carillons, l’Agence Sixième Son a inventé un nouveau vocabulaire sonore pour le transport et a engagé la marque dans un univers plus émotionnel et plus humain. Elle s’est vue remettre en octobre 2010 le « Grand Prix Stratégies du Design », couronnement de cinq années d’un travail de partenariat étroit entre l’agence et la SNCF. Destiné à créer un lien fort entre la marque et ses clients, ce projet achevé en 2010, avait aussi pour but de créer une identité sonore commune, utilisée aussi bien dans les gares et les trains que dans l’ensemble des médias. A son propos, son concepteur Mickael Boumendil raconte que «… ces quelques notes que l’on entend avant les messages représentent un challenge colossal de conception, dont tout le monde comprend qu’il peut facilement tourner au casse-tête. Il y a dans ce travail un vrai enjeu d’image, un enjeu d’information, un enjeu acoustique dans des espaces pollués par le bruit des machines, le bruit des gens, la réverbération des espaces souvent mal servis par des systèmes de sonorisation très disparates et souvent obsolètes. Pour des questions de confidentialité et de confort des voyageurs, cela n’a pas été possible de faire les tests au grand jour. On a choisi des horaires spécifiques, des quais éloignés, on a organisé des crash tests et des mises en situation dans des conditions extrêmes. Quand Louis Gallois a appuyé sur le bouton destiné à lancer la nouvelle identité visuelle, la nouvelle identité sonore et la nouvelle signature publicitaire, l’équipe de Communication de la SNCF a retenu son souffle. L’émotion a emporté les quelques 3 000 collaborateurs de la SNCF présents pour l’occasion. Le film fut acclamé et le sonal fait déjà parler de lui. Aujourd’hui encore, il reste une référence inégalée dans le paysage du design musical en France et ailleurs. » (marketing-professionnel.fr, Mai 2009)

Enfin, l’utilisation de sons appropriés peut aussi contribuer à la sensation de sécurité : chez ACCOR, la Direction de l’Innovation a fait un travail de recherche très important sur le bruit des portes de chambre en tant qu’élément de sécurité. La promesse d’une bonne nuit ne peut être tenue sans la garantie pour le client qu’il est en sécurité : une porte blindée ne sert à rien si le son qu’elle émet ne donne pas cette impression.

L’expérience sonore est importante, mais elle n’est pas toute l’expérience sensorielle : elle nous rappelle combien le son c’est la vie a une époque qui est faite de beaucoup de bruits.

Source : « Marketing Sensoriel » L. Body & A.Giboreau Ed Vuibert 2012

Prochain article, la dimension olfactive des expériences physiques.

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