Les nouveaux besoins des voyageurs 2/8
« Le tourisme passif ne suffit plus.
Les voyageurs en quête de sens veulent s’aventurer hors des sentiers touristiques battus pour se plonger dans l’authenticité de la culture locale, créer des liens réels et profonds avec des gens d’autres cultures, faire l’expérience de la vie artistique, architecturale et musicale, découvrir la cuisine et les spécialités du coin, faire du sport, partir à l’aventure et goûter à la nature, apprendre la langue, l’histoire, l’économie et la littérature, participer à des œuvres philanthropiques et donner un peu d’eux-mêmes. Plus que jamais, les voyageurs partent vivre leur passion. L’offre touristique doit amener le touriste à s’engager dans des actions sources de souvenirs afin de vivre une suite d’immersions extraordinaires et à interagir avec son environnement » Joe Diaz AFAR
Nous vivons un changement d’époque : les touristes souhaitent que les vacances leur apportent davantage. On ne « fait » plus un pays, une ville, on refuse d’être de simples observateurs, on tient à participer et à s’immerger dans le milieu que l’on visite. Les destinations ne peuvent plus se contenter de vendre des visites guidées ou des activités, elles doivent mettre en marché des expériences -actives, co produites ou contemplatives-, fondées sur les raisons qui poussent les gens à voyager. A l’ère des vacances post pandémie, les touristes prennent du galon et selon la distance ou la durée du séjour deviennent des visiteurs, des voyageurs … ou des poètes dont les besoins fonctionnels –proximité, accessibilité, tranquillité…- sont complétés par des besoins plus personnels et centrés sur leurs motivations profondes.
En réaction à l’approche cognitiviste –marketing classique- qui ignore les pratiques ludiques, les plaisirs sensoriels et esthétiques, l’approche expérientielle valorise les moments qui procurent des émotions et permettent de retrouver le ressourcement nécessaire à l’équilibre et l’alignement. Le tourisme expérientiel invite les visiteurs à s’impliquer dans des activités personnelles qui résonnent avec leurs valeurs, il met tous les sens à contribution, il engage au niveau physique, affectif, social ou spirituel, il favorise le lien avec les communautés locales dans le respect de l’environnement et de ses ressources. La valeur de consommation ainsi produite est collaborative, préférentielle et émotionnelle et ne réside pas seulement dans le produit lui même mais dans l’expérience de consommation associée et qui peut être source de joie, de paix intérieure et créatrice de souvenirs.
En 1982, Holbrook et Hirschmann définissaient la consommation expérientielle comme « un état subjectif de conscience acccompagné d’une variété de significations symboliques, de réponses hédonistes et de critères esthétiques. » 40 ans après, elle s’enrichit des valeurs de sens avec l’importance accordée à la préservation de la planète et au respect des acteurs de l’écosystème.
Quels sont les besoins des voyageurs d’aujourd’hui ?
« En 1900, le travail occupait 40% de la vie d’un homme. Aujourd’hui, nos contemporains y consacrent environ 10%. Ce changement complet de paradigme est induit par notre désir de découverte et de de déconnexion . Le voyage, le tourisme et le besoin d’aller vers les autres sont au coeur de ce qui constitue notre humanité.. Malgré une conscience ecologique toujours plus grande, malgré un retour à des vacances plus près de chez soi, l’envie d’ailleurs et des autres ne nous quittera pas . » Jean Viard, L’an zero du tourisme
Aujourd’hui, le tourisme expérientiel est porté par la génération Y et s’inscrit en totale rupture avec les pratiques des baby boomers et de leurs enfants : rejet du tourisme de masse, pratique du télétravail qui brouille la frontière entre le travail et les vacances (workation), besoin de reconnexion avec la Nature, avec son corps …. avec soi même, soif de découvertes, de rencontres avec des locaux, des gens authentiques et inspirants dans un environnent sécurisé.
La distance, l’exotisme ou même le prix ne sont plus des critères de choix pertinents : seule compte la capacité de la destination à refléter sa personnalité et à incarner les dimensions recherchées de tranquillité, esthétisme, naturalité, convivialité, richesse gastronomique (produits locaux divers et de qualité), culturelle, patrimoniale, topographique, biodiversité…
Le touriste d’aujourd’hui ne cherche pas tant à cocher les cases “been there, done that” qu’à faire coïncider ses choix de destination avec son style de vie et ses valeurs, C’est un changement de comportement qui rebat les cartes de l’attractivité territoriale, toutes les destinations proches ou lointaines étant désormais en concurrence les unes avec les autres dans la quête de satisfaction des nouveaux besoins : la Sarthe est en concurrence avec la Somme mais aussi avec certaines parties de la Suisse ou du Canada, la Charte sur le Loir est en concurrence avec Chinon, et d’autres villes en Europe proches de métropoles régionales mais bénéficiant d’un environnement très qualitatif.…
Le nouveau moteur de recherche de Airbnb prend en compte ces changements de comportements et propose 50 catégories issues des commentaires clients et des descriptions des propriétaires. La destination n’est plus une donnée d’entrée mais le fruit du calcul de l’algorithme qui recompose ainsi des typologies de consommation sur la base des comportements et du vécu des clients -maison avec vue, art et créativité, cuisine equipée..- Exit les critères classiques de localisation géographique, de type d’hébergement, ou qualité des équipements. Temps long, fractionnement des vacances et flexibilité sur la date et le lieu des vacances sont les nouveaux piliers de la demande, ainsi que la présence d’un Wifi de qualité qui a fait l’objet de 288 Millions de requêtes l’année dernière sur la plateforme.
Dans ce contexte de multiplication des séjours vers des destinations accessibles en train ou en voiture, tous les territoires, même les moins connus, les plus enclavés, disposent du même potentiel d’attractivité grâce aux “trésors” cachés qu’ils recèlent, ces marqueurs d’authenticité que les habitants négligent mais dont les visiteurs raffolent. Ainsi débarrassées d’une réputation héritée du passé, elles ouvrent la porte aux opportunités et rendent possible les microaventures, des expériences locales et accessibles à tous et toute l’année. La plateforme Chilowe propose des centaines d’aventures à vivre près de chez soi, le magazine GEO fait redécouvrir des destinations proches hors saison, ….
A l’heure de la réinvention du tourisme il est important de ne pas perdre de vue son rôle de créateur de lien social : en favorisant les rencontres et le partage et en préservant la planète et ses ressources, il doit mobiliser autour de lui ce qu’il y a de meilleur en nous, notre humanité.
Cet article est le second d’une série qui va animer votre été et changer votre regard sur la conception d’expériences bonnes pour les visiteurs, les collaborateurs, le territoire… et la planète !
1. L’expérientiel, la nouvelle frontière du tourisme
2. Plus d’expériences et de sens, moins de prix : les nouveaux besoins des voyageurs
3. Expériences et ecosystèmes de valeurs : le rôle des communautés pour redéfinir les destinations
4. L’expérience voyageur pour aller au delà des labels et des systèmes de qualité
5. L’expérience collaborateur, l’autre secret pour engager et fidéliser ses équipes
en collaboration avec Brice Duthion
6. Scénariser et chorégraphier des expériences durables, désirables et mémorables
7. Les outils du design d’expérience touristique : blueprints, storyboards, playbooks, living labs, ecosystèmes d’acteurs…
8. Tour du monde des meilleures expériences et territoires expérientiels
Le tourisme ne prend pas de vacances : stay tuned !
Chez X+M, nous avons accompagné des destinations de premier plan ans la conception d’expériences visiteurs qui font la différence. Vous voulez la liste des projets que nous avons conduits ? Contactez moi
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